Le téléscope NICER installé sur l’ISS scanne le cœur des étoiles à neutrons, et apporte de nombreuses informations sur leur nature. Dernière annonce en date : la plus massive que l’on connaisse, PSR J0740+6620, est plus grande que les prévisions de nombreux modèles ; de l’ordre de 25 kilomètres de diamètre. Pour mesurer leur rayon, les physiciens peuvent utiliser deux méthodes : par déduction à partir de la vitesse de rotation de l’étoile ; ou en exploitant la courbure de l’espace-temps qui dépend des propriétés globales de l’étoile, dont sa masse et son rayon.

Connaître le rayon des étoiles est indispensable pour connaître leur nature et ainsi les comparer aux modèles mis au point par les théoriciens. Les scientifiques ne sont pas en mesure aujourd’hui de connaître précisément ces interactions, et proposent des modèles pour décrire le cœur des étoiles à neutrons. Confronter alors les prédictions de ces modèles d’interaction, qui donnent les propriétés de l’astre, aux observations permet ainsi de les valider ou non et donc de sélectionner les plus pertinents. Jérôme Margueron, directeur de recherche CNRS à l’Institut de Physique des deux Infinis de Lyon nous éclaire sur l’importance que prennent ces mesures pour la physique théorique. « Beaucoup de modèles prédisent une réduction du rayon de l’étoile à mesure que sa masse augmente, avec de nouvelles particules qui contribuent à adoucir l’équation d’état. Par exemple, de nombreux modèles ajoutant des hypérons, un type de particule composé de quarks dits « étranges », sont dans ce cas, et donc en désaccord avec l’observation. Un des modèles qui pourrait survivre, c’est le modèle quarkyonique, développé par Larry McLerran et Sanjay Reddy de l’Université de Washington (Seattle), qui a le vent en poupe et sur lequel j’ai travaillé avec mon doctorant Rahul Somasundaram pour l’intégrer aux étoiles à neutrons, précise le physicien. C’est un modèle qui décrit quarks et nucléons comme deux représentations d’un même objet quantique, en opposition avec la description traditionnelle des transitions de phase, qui considère des particules de nature différente. Et ses prédictions sont compatibles avec les observations sur J0740.

Avec les publications sur J0030 et maintenant ces résultats sur J0740, Nicer et les méthodes d’analyse qui l’accompagnent montrent leur statut d’instrument indispensable pour l’étude des étoiles à neutrons et complémentaires des interféromètres d’ondes gravitationnelles. L’étude déjà prévue d’autres pulsars, avec des masses différentes des deux premières, permettra d’affiner encore les connaissances à leur sujet et les théories autour de l’interaction forte, qui sont au cœur de la physique moderne.

Pour en savoir plus : https://arxiv.org/abs/2104.13612
Contact : Jérôme Margueron