Une collaboration internationale rassemblant l’IRFU (Université Paris-Saclay), l’Institut d’Astronomie de l’Université d’Hawaï, le LPC (Université Clermont Auvergne), l’IP2I (Université Claude Bernard Lyon 1), et le Racah Institute of Physics (Université Hébraïque de Jérusalem), a découvert une immense structure dans la distribution des galaxies, lui donnant le nom de Mur du Pôle Sud.
La recherche en cosmologie a été marquée ces quarante
dernières années par la découverte de structures de plus en plus
grandes, à mesure que les instruments permettaient de sonder des régions
de l’Univers de plus en plus vastes et lointaines : tout d’abord en
1986 la découverte, par une équipe du Smithsonian Center for
Astrophysics, du Grand Mur, une structure d’une dimension de 500
millions d’années-lumière connectant notamment les amas de galaxies dans
les constellations d’Hercule et de la Chevelure de Bérénice. Puis en
2003, ce fut la découverte, grâce au relevé digital automatisé SDSS
Sloan Digital Sky Survey, du Grand Mur de Sloan, une structure
filamentaire de dimension 1.4 milliards d’années-lumière et située à
environ 1 milliard d’années-lumières. En 2016, dans le cadre du Baryon
Oscillation Spectroscopic Survey, c’est la découverte du Grand Mur de
BOSS, un complexe de morphologie similaire à celle du Grand Mur de
Sloan, mais à beaucoup plus grande distance.
Dans cette histoire des découvertes des grandes structures, une région
du ciel est demeurée essentiellement inexplorée, une « Astra
Incognita », dans la direction du Pôle Sud Céleste (c’est-à-dire le long
de la ligne définie par l’axe de rotation de notre planète, dans la
direction Australe). Cette région, située aux limites observationnelles
des télescopes implantés dans les observatoires situés les plus au sud,
tel que l’Observatoire de Siding Springs en Australie, est caractérisée
par la présence d’épais nuages de poussières galactiques, tel que le
Complexe de nuages dans la constellation du Caméléon, ou la présence des
Nuages de Magellan, deux galaxies satellites de notre galaxie, qui
masquent des pans entiers du ciel profond. Les relevés de galaxies ont
donc été pénalisés par la présence de trous dans leurs couvertures du
ciel dans cette région la plus australe.
Cependant, une nouvelle étude, basée sur l’analyse des mouvements des
galaxies, a permis d’explorer pour la première fois cette région. En
effet, le mouvement des galaxies, généré par la gravitation, trahit la
présence de matière y compris dans des régions non observées
directement. En utilisant la toute dernière génération du catalogue de
vitesses de galaxies, Cosmicflows-3, qui compte environ 18000 mesures de
vitesses de galaxies ou groupes de galaxies, une reconstruction de la
distribution de la matière en 3D dans le ciel austral a révélé la
présence d’un mur inconnu jusque-là : le Mur du Pôle Sud. Il est de
morphologie et de dimension similaires à celle du Sloan Great Wall, tout
en étant deux fois plus proche de nous. Son cœur est situé dans la
Constellation du Caméléon, et il comprend un long filament quasi
rectiligne connectant des secteurs particulièrement denses dans les
constellations de l’Oiseau de paradis et du Lièvre. Se prolongeant en
s’incurvant pour atteindre le secteur de la constellation d’Eridan près
de l’équateur céleste, il décrit un immense un arc qui enlace les
frontières du Sud de Laniakea, le bassin d’attraction gravitationnel
dans lequel est situé notre galaxie, la Voie Lactée.
Poursuivant cette entreprise de cartographie du Cosmos, la collaboration
travaille désormais à la préparation de la future génération de
catalogue de vitesses de galaxies, Cosmicflows-4, avec l’inclusion de
nouvelles mesures obtenues dans l’Hémisphère Nord avec les
radiotélescopes de Green Bank et Arecibo.
Une vidéo détaille cette découverte, présentant des visualisations interactives et des images haute résolution est disponibles ici et l’article est visible là.